Des réalités

Claire Chevrier - CNP octobre 2001

Mon exposition au CNP prenait pour thématique les paysages mi-industriels mi-ruraux, une des dimensions de mon travail à cette période. Mes préoccupations liées à la guerre, au pouvoir, à l’illusion, à la répétition de l’histoire, à la mémoire … demeurent des thèmes récurrents qui se déploient sous différentes formes.

Comment faire une image du Vercors, aujourd’hui ? Après différents essais, j’ai fini par comprendre que ma recherche était liée à Vassieux haut-lieu de la Résistance, détruit par les allemands. L’enjeu n’était pas pour moi de réifier par l’image la stratégie militaire déployée par l’occupant pour atteindre les maquisards. Il s’agissait de proposer une lecture de la représentation artificielle d’un site qui n’existe jamais comme totalité mais comme seul paysage.
Dans la continuité du questionnement, j’ai abordé les dimensions architecturales de ce qui fait décor dans les territoires d’aujourd’hui. Des entreprises Philips qui construisent seulement la façade de maisons pour valider des systèmes d’éclairage aux showrooms de Hong Kong produits par les groupes immobiliers où la vue imprenable sur la baie prend la forme d’un caisson lumineux, j’explore les systèmes de représentations où dans l’articulation de la réalité à la fiction se joue la dissolution de leurs limites.
Mon travail fonctionne en ramifications. Mes images interrogent le monde qui nous entoure dans ses formes expressives de la violence latente ou refoulée à la violence assumée. Elles fondent le champ de mes questionnements. Mon travail actuel interroge la place de l’individu dans la constitution de mégapoles. A quelles conditions « l’homme sans qualité » peut-il s’approprier ou se réapproprier un espace qui est construit sur une image, une économie et un projet de société qui lui est culturellement étranger ? Inspiré de l’œuvre d’Ilya Kabakov « C’est ici que nous vivons », ce projet qui a fait l’objet d’une bourse du FIACRE est conduit sur cinq mégapoles ; Hong Kong, Bombay, Mexico, Los Angeles, et Lagos.

Claire Chevrier

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